Traité de Shimonoseki et l’époque de Claudius MADROLLE

Le traité de Shimonoseki et ses conséquences : au tournant du XIXème et du XXème siècles, l’Occident profite de la défaite de la Chine face au Japon pour demander de nouveaux territoires à l’Empire du Milieu. Pour mieux comprendre l’ouvrage de Claudius MADROLE sur l’île de Haïnan, nous donnerons un aperçu des enjeux de l’époque.

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Accéder aux chapitres précédents :

Destination Haïnan pour étudiants en vacances – Chapitre I

Claudius MADROLLE et retour à Haïnan – Chapitre II

Chapitre III

Le traité de Shimonoseki

et

l’époque de Claudius MADROLLE

Accueil » Conseils et outils pour étudiants » Traité de Shimonoseki et l’époque de Claudius MADROLLE
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Le ton de l’ouvrage de Claudius MADROLLE

慢慢學習…… Prenons le temps d’étudier… Quatre pages après le titre, nous trouvons l’annotation suivante :

Pour servir à l'Etude de la Zone d'Influence française en Chine.
Pour servir à l’Etude de la Zone d’Influence française en Chine – page 8 non paginée – Source gallica.bnf.fr

Le ton de l’ouvrage est donné. Comme nous l’avons souligné dans la première partie Destination Haïnan pour étudiants en vacances” lorsque nous nous sommes penchés sur la préface, l’aspect colonial de cette étude sur Haïnan est bien l’un des axes mis en avant. Cela est confirmé 4 pages plus loin ne serait-ce que par l’édition elle-même : Augustin CHALLAMEL Editeur – Librairie Maritime et Coloniale.


Un tirage limité à 325 exemplaires

Le tirage du livre "Hai-nan et la côte continentale voisine" de Claudius MADROLLE a été limité à 325 exemplaires.
Le tirage a été limité à 325 exemplaires – Extrait de la page 11 non paginée. Claudius MADROLLE – Source gallica.bnf.fr.

L’extrait ci-dessus, nous permet d’affirmer que ce livre était destiné à un nombre très limité de personnes. En effet, il n’a été tiré que 300 exemplaires ordinaires et 25 de luxe. A partir de cette constatation, nous pouvons proposer l’hypothèse suivante : une grande partie de cette édition a due être destinée voire offerte à un public ciblé afin d’obtenir des appuis logistiques et pécuniers pour poursuivre l’exploration de cette partie de l’Asie.

Affirmation versus Hypothèse


Tant que vous ferez la part des choses entre vos affirmations et vos hypothèses, vous resterez inattaquables quant à la qualité de vos recherches.

Si votre hypothèse est confirmée ou infirmée au cours de vos travaux, précisez-le à chaque fois. L’erreur est toujours acceptée lorsqu’elle est reconnue sous l’égide de l’hypothèse.

Une hypothèse qui s’avère erronée reste utile car elle évitera à d’autres de s’engouffrer dans la même direction.

De Claudius MADROLLE à Emmanuel MACRON

De nos jours, l’ambition personnelle s’exerce souvent aux dépens de l’attachement à notre pays. Mais, à la fin du XIXème siècle et à travers la colonisation, la seule ambition de Claudius MADROLLE est de faire briller la France et de protéger ses intérêts. L’extrait manuscrit trouvé en bas à gauche d’une carte réalisée par l’auteur en dit long sur son attachement à la patrie :

Extrait de la carte manuscrite de Claudius MADROLLE intitulée “Feuille Nord-Est de l’île d’Hai-nan : Itinéraires de M. Cl. Madrolle en 1896 et 1907-08” – Source gallica.bnf.fr.

La bien-pensance actuelle qui fustige l’ensemble des épisodes colonisateurs ne comprend rien à l’Histoire. Que dire d’Emmanuel MACRON, lorsqu’il affirme que “la colonisation est un crime contre l’humanité” ! Seul un ignare ou (et ?) un haineux de la France peut prononcer une telle absurdité !

Méconnaître l’Histoire peut donc conduire à l’Elysée…

Le train de l’Histoire

L’Asie en général et la Chine en particulier sont le théâtre de grands bouleversements à cette période charnière du XIX et XXe siècles. Conflits et tensions endogènes et exogènes prennent place au milieu d’une course au commerce international dont l’établissement des lignes ferroviaires est emblématique.

Notons au passage que le commerce sur de longues distances n’est pas la résultante de la colonisation. Il suffit de se pencher sur les périodes préhistoriques et protohistoriques pour s’apercevoir que l’échange à grandes distances est un trait de l’Humanité bien avant que le concept de Nation naisse.

De Brest à Taihoku (nom de la ville de Taïpei rebaptisée par l’Empire Nippon) en passant par Vladivostok, chaque grande puissance souhaite importer le chemin de fer sur de nouveaux territoires. Cette course au développement du rail s’associe à la recherche de matières premières telles les métaux et le charbon dont elle dépend, par exemple. Le ballast et les traverses au XIXe siècle font appel aux minéraux et à l’exploitation du bois. Quant aux gares, tous les corps de métiers du bâtiment sont sollicités. Le Train est une aventure humaine titanesque !

C’est dans ce contexte historique qu’éclate la guerre sino-japonaise le 1er août 1894. La Chine défaite, signe le traité de Shimonoseki le 17 avril 1895 dont les répercussions font penser au “battement d’ailes d’un papillon” .

Afin de mieux appréhender cette période, nous devons donc comprendre les conséquences de ce traité sino-japonais déjà mentionné dans le premier chapitre à la section Destination Haïnan.

Conséquences du traité de Shimonoseki

Lorsque nous parlons du traité sino-japonais de Shimonoseki, le nom de Taïwan 臺灣 nous vient à l’esprit. Mais Formose et ses îles proches ne sont pas les seules terres chinoises concernées par la cession de territoires. Sont aussi cédés à l’Empire Nippon l’archipel des Pescadores 澎湖列島 et la péninsule du Liaodong 遼東半島.

Vidéo pour situer Haïnan, Taïwan et la péninsule du Liadong

Petite vidéo pour situer les différents endroits dont nous parlons :

Situer l’île de Haïnan 海南島, Taïwan 臺灣, la péninsule du Liaodong 遼東半島 et Port Arthur sur une carte. Cette carte intitulée “La Chine (Tchong-Kouo ti t’ou) 中國地圖” par L. Richard est disponible sur gallica.bnf.fr.

Or, si la cession de Taïwan et celle de l’archipel des Pescadores au Japon ne provoquent pas le mécontentement des puissances étrangères présentes en Chine, il n’en est pas de même pour la péninsule du Liaodong.

Remarquons au passage le désintérêt de la part des Qing pour l’île de Formose qu’ils ont cédée sans hésitation car éloignée et non digne d’intérêt pour l’Empire Chinois.

La péninsule du Liaodong 遼東半島

La Russie, puis la France et l’Allemagne voyant la cession du Liaodong aux Japonais comme contraire à leurs intérêts dans cette région du globe, font en sorte que le Japon renonce à ce morceau de territoire chinois. Cette renonciation fut “[…] confirmée par une proclamation impériale du 13 mai 1895.” [SWEN Wen Ming 1936 : 72]

SWEN Wen Ming (dates inconnues)


SWEN Wen Ming, 1936, “Étude sur les traités politiques sino-étrangers” , Thèse pour le doctorat présentée et soutenue le 14 décembre 1936 à 14 heures, Editions Pierre Bossuet, Paris, 255 pages.

N’hésitez pas à vous plonger dans la thèse de SWEN Wen Ming. Les parties concernant les différents traités nous transportent au sein des rapports de force des grandes puissances du XIXe et XXe siècles. Les Chinois ont coutume de nommer ces traités de “traités inégaux” qui donnèrent lieu à un démantèlement de l’Empire de Chine.

Port-Arthur et ses avantages pour la Russie

La péninsule du Liaodong 遼東半島 et Port Arthur.
La péninsule du Liaodong 遼東半島,  Port Arthur 旅順港 et Port Dalny 大連港. Extrait de la carte intitulée “La Chine (Tchong-Kouo ti t’ou) 中國地圖” par L. Richard est disponible sur gallica.bnf.fr.

Nous soulignons aussi l’importance de Port-Arthur 旅順港 et de Port Dalny 大連港 situés vers le bas de la presqu’île du Liaodong. Haut lieu stratégique et économique, Port-Arthur intéresse beaucoup les Russes.

Contrairement au Port de Tientsin 天津港 dont les eaux sont prises par les glaces en hiver “de décembre à mars” [LACÔTE Théodore-Pierre-Moïse 1884 : 18], Port-Arthur bénéficie d’un climat clément et de courants chauds qui le laissent libre d’accès lorsque Pékin et Tientsin sont sous la neige et les glaces. Sans entrer dans les détails, transports maritimes et ferroviaires sont des éléments importants aux yeux de l’Empire de Russie.

LACÔTE Théodore-Pierre-Moïse (dates inconnues)


LACÔTE Théodore-Pierre-Moïse, 1884, “Les ports chinois ouverts au commerce étranger” , in Annales catholiques : revue religieuse hebdomadaire de la France et de l’Église, Tome XLIX du 28 septembre 1884(noté 27 septembre sur Gallica), pp. 696-700.

Nous retrouvons le texte de LACÔTE dans une note du Ministère de la Marine et des Colonies adressée au Président par Félix FAURE :

MINISTERE DE LA MARINE ET DES COLONIES, FAURE Félix, LACÔTE Théodore-Pierre-Moïse, 1884, Note sur les ports chinois ouverts au commerce étranger, Service des Colonies – 2me sous-direction, Bureau du Régime économique des Colonies, Paris, le 14 août 1884, 5 pages non numérotés et 28 pages.

Vidéo sur l’intérêt des cartes et sur Port Arthur

Vidéo réalisée grâce aux cartes disponibles sur gallica.bnf.fr – De l’intérêt des cartes et de Port Arthur pour les puissances étrangères.

Nous insistons dans la vidéo ci-dessus sur les tracés des voies ferrées car les cessions de territoires à bail s’accompagnent dans la majorité des cas par des accords concernant l’implantation des chemins de fer de la part des puissances étrangères.

Comme les Russes, les Allemands et les Anglais obtiennent à leur tour des territoires sur les côtes chinoises. La baie de Kiau Chau (Jiaozhou wan – 膠州灣) est offerte à l’Allemagne et Kowloon, en face de l’île de Hongkong, est cédé à l’Empire Britannique.

Qu’en est-il de la France ? A l’instar des autres grandes puissances occidentales, elle demande un territoire à la dynastie Qing. Son regard est tourné vers la dernière grande île chinoise, à savoir Haïnan, qui fait face aux côtes d’une partie de l’actuel Vietnam : l’Annam et le Tonkin sous protectorat français.

Haïnan ne sera pas française mais Paris obtient “la garantie que Hainan ne pouvait être concédé à aucune autre puissance” . [BONNINGUE Alfred Edmond Victor 1931 : 10]

C’est ainsi qu’un tout petit bout de territoire chinois se voit doté notre drapeau tricolore. Il se nomme le Kouang-Tchéou-Wan.

Kouang-Tchéou-Wan : un territoire à bail français

Les ailes du papillon de Shimonoseki ont donc permis à la France d’agrandir son territoire pour une durée de 99 ans.

Le 11 avril 1898, la rade de Kouang-Tchéou (Guangzhou wan 廣州灣) est cédée à la France [BONNINGUE Alfred Edmond Victor 1931: 9].

BONNINGUE Alfred Edmond Victor (18??-1935)


BONNINGUE Alfred Edmond Victor (Capitaine d’Infanterie Coloniale), 1931, La France à Kouang-Tchéou-Wan, Editions BERGER-LEVRAULT, Paris, X et 71 pages.

Dans le chapitre II, nous nous sommes intéressés à la péninsule de Lei-tcheou 雷州半島 qui se trouve en face de l’île de Haïnan et séparée par le détroit de Haïnan. La baie de Kouang-Tchéou est située au Nord de la péninsule, sur la côte Est. Sur la carte ci-dessous, elle est entourée d’un large trait vert pâle.

Extrait de la carte intitulée “Indochine” – 1942 – Indochine française, Service géographique – Service Géographique de l’Indochine (Hanoï) – Source gallica.bnf.fr

Petit territoire mais important pour la France

Ces quelques îles et cette petite baie peuvent sembler dérisoires comparées à la géante Haïnan mais dès que nous nous intéressons aux côtes et aux ports, mieux vaut ne jamais sous-estimer l’importance d’une parcelle, aussi petite soit-elle.

En 1937, l’imprimeur éditeur Georges TAUPIN stipule dans son guide sur l’Indochine que “cette baie présente un port en eaux profondes, d’une longueur de plus de 27 km., accessible aux bateaux de tous tonnages par une passe balisée soigneusement et éclairée la nuit. Les navires y trouvent un abri très sûr contre les typhons fréquents de juillet à octobre” . [ TAUPIN Georges 1937 : 163]

Georges TAUPIN (1872-1945)


TAUPIN Georges, 1937, Guide touristique général de l’Indochine : guide alphabétique Taupin, Edition G. Taupin et Cie, Hanoï, 450 et XXXVI pages.

Pourquoi le Kouang-Tchéou-Wan ?

La baie du Kouang-Tchéou (Guangzhou wan 廣州灣) est déjà connue par les marins français. En effet, dès le second voyage de l’Amphitrite, ce vaisseau de 500 tonneaux mouille dans la baie du 16 novembre 1701 au 6 mai 1702 [PELLIOT Paul 1930 : 7-8]. Nous sommes à l’époque sous le règne de Louis XIV, près de deux siècles avant le traité de Shimonoseki et de ses conséquences pour cette rade chinoise.

Sans entrer dans les détails, ce petit bout de territoire chinois devenu français est une porte entre la Chine et nos colonies de l’Indochine au moment où les Britanniques sont très présents en Asie.

PELLIOT Paul (1878-1945)


PELLIOT Paul, 1930, L’origine des relations de la France avec la Chine – Le premier voyage de “L’Amphitrite” en Chine, extrait du Journal des Savants, Librairie Orientaliste Paul GEUTHNER, Paris, 79 pages.

Grace aux trois chapitres sur Haïnan et Claudius MADROLLE, vous avez maintenant les clefs suffisantes pour apprécier son ouvrage intitulé “Hai-nan et la côte continentale voisine : l’empire de Chinedisponible gracieusement sur le site gallica.bnf.fr.

Vous pouvez aussi attendre un prochain chapitre qui présentera enfin l’œuvre en question.

Mais avant de nous quitter, je souhaiterais faire le point sur les outils que nous avons utilisés pour réaliser ces trois premiers chapitres.

Des outils de recherches indispensables : les archives

Dans le premier chapitre concernant Claudius MADROLLE et son ouvrage sur Haïnan, je vous signalais l’importance du site Gallica et de l’outil Data de la BNF. Ces deux sites internet de la Bibliothèque Nationale de France sont incontournables pour les étudiants.

FranceArchives

Il existe un autre site indispensable aux étudiants chercheurs, celui de FranceArchives, le portail national des archives.

Bases de données versus Neurones


Une base de données, un programme, une recherche ROC, un ordinateur ne sont que des outils. Les outils, par définition, ne sont ni stupides, ni intelligents.

Si vous entrez dans la barre de recherche de FranceArchives le prénom et le nom de l’auteur “Claudius Madrolle”, vous n’obtiendrez qu’une seule référence. Evitez donc d’être trop précis et n’indiquez que le nom de la personne recherchée.

Certes, la totalité des références ne vous sera pas utile mais en triant, votre requête sera plus fructueuse.

Nous apprenons donc grâce à FranceArchives que Claudius MADROLLE a effectué une “demande de mission scientifique gratuite en Chine méridionale” en 1901 [FranceArchives – MADROLLE, Cl. explorateur].

Archives Nationales – Salle des Inventaires Virtuelle

La Salle des Inventaires Virtuelle vous permet d’accéder à plus de 8 millions d’images numérisées mais aussi aux 24.000 inventaires en ligne !

Concernant Claudius MADROLLE, nous sommes informés des références précises de l’inventaires : “Inventaire des papiers de la division des Sciences et Lettres du ministère de l’Instruction publique et des services qui en sont issus (sous-série F/17)” . Nous obtenons même la référence précise : F/17/17277.

Malheureusement, nous n’en apprenons pas plus que sur le site FranceArchives. La recherche de tabouret, à défaut de fauteuil, a ses propres limites. Armés de ces références, nous pourrions allez plus loin en consultant physiquement les archives mis à notre disposition.

Il serait intéressant de lire les demandes de projet de Claudius MADROLLE pour étayer notre hypothèse sur la destination première de l’ouvrage concernant l’île de Hainan.

Patrick LE CHEVOIR

03-07-2023

Droits d’auteur : tous droits réservés.


Patrick LE CHEVOIR
Patrick LE CHEVOIR

Mon DEA d’Ethnologie m’a ouvert les portes de plusieurs domaines : l’Anthropologie Sociale, l’Histoire, l’Art, la Rédaction, l’Agriculture et la Politique.


Publié par LE Xiao Long - Patrick Le Chevoir - 樂小龍

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